France: Des milliers de policiers défilent à Paris pour une «marche de la colère»
AFP
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10/3/2019 9:50:19 AM - Publié par webmaster@ekilafrica.com  


Des milliers de policiers ont défilé à Paris pour une «marche de la colère», une mobilisation inédite depuis près de 20 ans, sur fond de malaise de l’institution, de hausse des suicides et de réforme des retraites.
Le cortège est parti en début d’après-midi de la place de la Bastille, au cœur de la capitale, aux sons des pétards et des sirènes entrecoupés de La Marseillaise en direction de la place de la République.

Selon les organisations syndicales, qui ont réussi l’union entre tous les corps et grades confondus, 26 000 personnes participaient à la mobilisation. Il y a près de 150 000 policiers en France.

«Il y a un ras-le-bol profond», a fait valoir David Le Bars, secrétaire général d’un syndicat de commissaires. «Tous les syndicats ont conscience que la police est malade.»

De mémoire de syndicalistes policiers, on n’avait pas vu un tel appel unitaire depuis 2001.

Contrairement aux précédentes mobilisations, ce n’est pas un fait divers sanglant qui a agi comme élément déclencheur, mais une usure opérationnelle liée au mouvement social des gilets jaunes, entrés en fronde contre la politique sociale et fiscale du gouvernement depuis près d’un an, et un bond des suicides au sein de la police (52 depuis janvier), un mal endémique dans l’institution.

«Nous sommes venus ici pour nous battre pour nos conditions de travail, et surtout pour rendre hommage à nos collègues qui ont mis fin à leurs jours», a déclaré dans le cortège Damien, 24 ans, policier à Paris.
«Protéger la population»

Il évoque des conditions de travail «catastrophiques» : «Nos véhicules ont 300 000 km au compteur, nos locaux sont insalubres, il y a des cafards et des souris dans notre cafétéria et dans nos vestiaires, mais pour nos chefs c’est normal», s’énerve-t-il.

Les manifestations des gilets jaunes, qui ont parfois dégénéré en violents affrontements et en scènes d’émeutes, ont ranimé les polémiques sur le maintien de l’ordre, alimentées par les images de manifestants blessés - près de 2500 - parfois grièvement.

Pour Yves, 54 ans, dont 32 ans dans la police, depuis le mouvement gilets jaunes «on voit toujours le coup de matraque mais jamais le pavé de 10 kg qu’on nous lance».

«Je ne me lève pas en me disant "Je vais casser la gueule à deux, trois mecs" […], mais pour protéger la population», affirme ce policier du sud de la France.

Un millier de policiers ont aussi été blessés dans les manifestations des gilets jaunes au cours desquelles l’un des slogans les plus populaires est «Tout le monde déteste la police». Il y a moins de cinq ans, après les premiers attentats djihadistes, les policiers étaient ovationnés.

Ému, Brahim, 48 ans, ne supporte plus «la haine anti-flic et la détérioration du rapport avec la population», et envisage de changer de métier car il a «perdu la foi».

«Il y a aujourd’hui des éléments qui s’ajoutent les uns aux autres : après la vague d’attentats terroristes, les forces de l’ordre ont dû faire face avec les gilets jaunes à une mobilisation dans la durée, avec des conditions d’intervention très difficiles. Il y a également la question des suicides qui ressurgit, mais aussi les relations détériorées avec la population», a expliqué Jacques Maillard, qui co-dirige un centre de recherches sur le droit et les institutions pénales.

Les policiers sont aussi inquiets des projets de réforme des retraites, craignant une remise en cause de leur avantageux système.

Face à cette nouvelle fronde, le ministère de l’Intérieur met également en avant les efforts budgétaires consentis, avec la hausse «de plus d’un milliard d’euros» du budget de la police nationale depuis le début du mandat du président Emmanuel Macron, en 2017, et la promesse du recrutement de 10 000 policiers et gendarmes.
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