Les agriculteurs français en colère bloquent des dépôts de carburant
AFP
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6/11/2018 11:25:38 AM - Publié par webmaster@ekilafrica.com  


Tracteurs, bottes de paille et détermination: les agriculteurs français protestaient lundi devant 13 raffineries et dépôts de carburant de toute la France contre les "incohérences du gouvernement" et les importations de produits agricoles ne respectant pas selon eux les critères français et européens, dont l'huile de palme utilisée dans les biocarburants.
"Nous avons entre 70 et 160 personnes sur 13 sites et un quatorzième va être bloqué à partir de 9H30, celui de Donges en Loire-Atlantique", dans l'ouest du pays, a indiqué lundi matin à l'AFP Christiane Lambert, présidente de la FNSEA, premier syndicat agricole français qui a appelé au mouvement avec celui des Jeunes Agriculteurs (JA) pour trois jours reconductibles.

"La France importe un certain nombre de produits qui ne respectent pas les règles qu'on impose aux agriculteurs français. Ça concerne aussi bien la viande du Mercosur, le vin espagnol que l'huile de palme", dit à l'AFP Damien Greffon, responsable de ce syndicat pour la région parisienne. Près de Paris, les agriculteurs ont déversé, sous les yeux de la police, de grandes quantités de fumier, de terre et de pommes de terre pour bloquer les accès au dépôt de carburant de Grigny.

Les importations d'huile de palme accordées pour une bioraffinerie du groupe Total devant démarrer cet été sont au coeur des rancoeurs, "la goutte d'huile de palme qui fait déborder la coupe des problèmes des paysans", résume Pierre Lebaillif, président des Jeunes agriculteurs de Normandie (Ouest), interrogé par l'AFP.

Jusqu'à 300.000 tonnes par an d'huile de palme, produit hautement controversé car accusé de favoriser la déforestation en Asie du sud-est, doivent être importées pour alimenter la bioraffinerie de La Mède, dans le sud de la France. L'agriculture française peut fournir davantage d'huile de tournesol ou de colza, mais plus chères.

L'accès à ce site est bloqué depuis dimanche soir par plusieurs dizaines d'agriculteurs. Mais lundi, le ministre de l'Agriculture Stéphane Travert a prévenu que le gouvernement "ne reviendra(it) pas" sur l'autorisation donnée à Total d'importer de l'huile de palme.

- Pas de pénurie en vue -

Nécessitant jusqu'à 650.000 tonnes de matières premières par an, la bioraffinerie de La Mède utilisera aussi d'autres huiles, dont 50.000 tonnes de "colza français", a promis début juin le PDG de Total, Patrick Pouyanné.

Inacceptable pour les agriculteurs qui ont fait leurs comptes. "Avec la Mède, nous allons perdre 400.000 hectares de colza sur 1,5 million d'hectares au total" estime Samuel Vandaele.

Le mouvement des agriculteurs est observé avec intérêt par les ONG environnementales, d'ordinaire opposées à la FNSEA dans les dossiers phytosanitaires.

Les paysans espèrent aussi le soutien des consommateurs, en dénonçant les effets sur le contenu des assiettes d'accords commerciaux internationaux, comme le CETA signé avec le Canada et l'accord UE-Mercosur en cours de négociation.

"En Amérique du sud, la taille moyenne d'un élevage est de 24.000 bovins, en France un agriculteur élève en moyenne 80 vaches allaitantes, et on nous demande d'être toujours plus vertueux sur le plan de l'environnement", fait valoir Christiane Lambert.

Les agriculteurs demandent la réintroduction dans la loi Alimentation, examinée à partir du 26 juin au Sénat, d'un amendement sur l'interdiction d'importer toute denrée produite en utilisant des substances phytosanitaires interdites dans l'Union européenne.

Ils souhaitent aussi que le gouvernement renonce à son contingent d'importation d'huile de palme, et réclament un allègement du coût du travail salarié de saisonniers "qui est 27% plus élevé qu'en Allemagne et 37% plus qu'en Italie", selon Mme Lambert.

Une pénurie de carburant n'est pas à craindre dans l'immédiat, la France comptant au total sept raffineries en activité ainsi que 200 dépôts de carburant. De plus, l'État dispose de stocks stratégiques pour trois mois.



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