Le chemin de croix des seniors au Cameroun
par Michel Lobé Etamé

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Le Cameroun a hérité de la France d’une structure administrative qui devrait lui permettre de subvenir aux besoins essentiels de sa population : les écoles, les hôpitaux, l’administration territoriale, l’armée, la police, la Gendarmerie, la poste, etc. Mais cette structure est aujourd’hui convalescente. Elle ne répond plus aux attentes de la population. Les inégalités de revenus observés et l’inflation galopante témoignent de la descente aux enfers de tous les diplômés qui ne peuvent intégrer la vie active. Ce constat est encore plus inquiétant pour les retraités dont le niveau de vie est alarmant et qui ne disposent d’aucun revenu complémentaire.

Il n’est sans doute pas excessif de parler du chemin de croix des retraités car, à l’inverse, les jeunes diplômés subissent de plein fouet de la brutalité d’un système qui ne leur garantit aucune activité après de rudes études. J’ai délibérément choisi le cas des retraités qui aspirent à une vie tranquille après des années de labeur bien accompli. Pour les seniors, le départ en retraite est le début d’un supplice et un chemin de croix d’une extrême brutalité psychique.

Être retraité aujourd’hui au Cameroun est une épreuve difficile et sans issue. Quel que soit les fonctions occupées et le niveau de rémunération atteint, les pensions de cette couche de la population sont si faibles qu’elle est exposée à des jours difficiles. Le barème des retraites mis en place en 1974 n’est plus adapté. Les calculs s’y afférents n’ont jamais évolué.

Une précarité inquiétante

A un âge où la santé se fragilise régulièrement, le retraité ne peut subvenir au moindre de ses besoins car sa pension ne le lui permet pas. Il faut ajouter aux soins médicaux l’alimentation, les charges fixes dont le loyer, l’eau et l’électricité. Face à toutes ces charges, le retraité camerounais est d’avance condamné. Il ne peut satisfaire ses besoins élémentaires. La situation est encore plus difficile s’il doit payer les frais de scolarité de ses enfants en âge de scolarité.

Nous pouvons comprendre dès lors pourquoi certaines maladies affectent particulièrement cette couche de la population : accident vasculaire cérébral (AVC), diabète, insuffisance rénale, etc.

Ces maladies, courantes aujourd’hui, sont la conséquence logique du stress quotidien, de la mal bouffe, de la peur du lendemain, de l’indifférence affective et parfois du renoncement et qui provoque une précarité évidente des retraités. La baisse du niveau de vie crée un trouble permanent chez le retraité qui précipite sa descente aux enfers. C’est un problème sociétal lié à la perte du pouvoir d’achat qui ne trouvera sa réponse que par une mobilisation rapide des acteurs politiques pour relever leur niveau de vie.

Ces inégalités de revenus peuvent remettre en cause la cohésion sociale. Aucun débat n’est initié sur la faiblesse des revenus des retraités. Or, il est acquis que l’organisme qui gère les revenus des retraités a une santé à faire pâlir toutes les entreprises du pays (CNPS – Centre National De Prévoyance Sociale). Cet établissement, si riche et doté d’une structure enviable remplit-il sa mission sociale ? Ayons le courage de répondre par la négative. Les fonds collectés par la CNPS devraient améliorer le niveau de vie de ceux qui ont vaillamment travaillé et qui aspirent aujourd’hui à une retraite bien méritée.

Vers un revenu médian ?

Existe-t-il des politiques pour mettre fin à ce supplice ? La CNPS envisagerait-elle de construire des maisons de retraite pour les seniors désemparés ? La démocratie est un système ouvert où les problèmes sont débattus. La mortalité très élevée chez les retraités est inquiétante. Cette couche de la population coûte aussi très chère à la société. C’est un âge où la santé se fragilise et où le patient ne peut subvenir convenablement à ses besoins courants. S’il ne dispose pas de revenus complémentaires, il est exposé à la déchéance sociale. Ces cas sont très fréquents. C’est la conséquence d’une société où les inégalités de revenus augmentent très vite et laissent sur le carreau les jeunes, les retraités et les populations de campagne.

La déchéance sociale est cruelle. Elle ronge l’individu et le réduit parfois à la mendicité qui est l’expression d’une fin de vie absurde et injuste. Pourquoi ne proposerait-on pas un revenu médian ou une indexation des pensions à l’indice du coût de la vie dans un contexte inflationniste?

Un débat sur le sujet s’impose. Mais dans un pays où tous les débats sont étouffés, l’espérance est-elle encore possible ? Soyons courageux. Osons dire que la situation de la jeunesse camerounaise et celle des retraités est misérable quand on voit le train de vie mirobolant des fonctionnaires en exercice qui vivent dans un luxe insolent et indifférent parmi les pauvres.



Par Michel Lobé Etamé
Journaliste
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vendredi 8 septembre 2017

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Par JEAN le 09/09/2017
Michel La situation des pensions des cadres ayant travaillé dans le privé est encore plus grave. Le barême de calcul basé sur un coefficient de salaire de base plafonné à un niveau qui n'a rien à voir avec le salaire conduit à obtenir un montant de pension qui est extrêmement ridicule. Ceci explique aussi pourquoi certains cadres avisés se precipitent dans la voie de la corruption pendant leur fonction , pour tenter d'investir qui dans un "business",qui dans la construction d'immeuble commercial, qui dans une maigre plantation qui pourrait leur garantir quelque revenus complementaires quand viendra le temps de la retraite. Les compagnies d'assurances tentent d'offrir des formules d'assurances complémentaires mais les primes sont réellement inabordables. Les choix actuels la aussi ne garantissent qu'un petit capital qui est vite consommé lorsque survient la moindre maladie ou difficulté. Quand au montant de rente mensuelle, il ne permet meme pas de régler la facture d'eau. C'est très préoccupant. Bien vu Michel. Bon week end.
Par ANNIE le 08/09/2017
Cher Michel, Un petit mot pour accuser réception de ton édito. Eh oui, celui-ci est bien arrivé. Et, c'est sûrement dû au fait que je suis retraitée, ce sujet m'a beaucoup touchée. Moi qui trouvais qu'ici déjà ce n'était pas facile pour tous, je découvre à quel point, encore une fois, nous sommes privilégiés. Merci pour ce bel article, comme toujours plein de coeur et de générosité pour tes semblables. Amitiés à toi et à ton épouse (dont j'oublie sur le moment le prénom !). Annie
Par  le 08/09/2017
Bonjour Michel, J'ai sollicité les services spécialises au Cameroun il y a 4 ans pour la problématique des retraités : Difficultés sociales et sociétales, Manque de revenus, cout de la vie, reconnaissance sociale et le vivre ensemble, Problématique de la corruption, chute terrible des revenus à la retraite, Maladies du 3eme age à partir de 50 ans, La presse Camerounaise a fait échos de cette situation il y a 4 mois, envoie mail d'offre de service sans réponse. Le PNUD a expérimenté cette problématique à Lome AU TOGO en 2016. L'expertise d’accompagnement existe, le Cameroun ( tous les acteurs) ne semblent pas encore assez mature pour prendre ce problème à bras le corps. Bonne journée,
Par Ferdinand EZEMBE le 08/09/2017
Bonjour Mr Lobe J'ai lu avec attention votre éditorial, mais les choses sont plus complexes et ne mettons pas tout sur le dos de l’état. Il y va aussi de la responsabilité individuelle, à force d'accuser l'Etat on déresponsabilise les individus. Combien de camerounais sont prêts à prendre une mutuelle complémentaire pour leur retraite ? Beaucoup de personnes perçoivent une bonne retraite, mais ont épousé plusieurs femmes et ont à entretenir une cour élevée d'enfants et de maitresses souvent très jeunes, certains se remarient dès qu'ils sont à la retraite, On fait beaucoup d'enfants sans avoir la capacité de les élever . Macron avait évoqué ce problème les africains lui sont tombés dessus. La plupart de gens font des dépenses inconsidérées dans les deuils, à l'église, dans les mariages etc...alors qu'ils sont pauvres quand on leur fait la réflexion la dessus ils vous accusent d’être un blanc. Si on fait un séminaire pour demander aux gens de préparer leur retraite, comme cela se fait ici ils vous envoient balader. Tout le monde veut vivre au jour le jour. Pour terminer je m'étais occupé du problème des retraités il y a quelques années, suite au départ à la retraite d'une de mes sœurs, ses collègues comme elle, avaient très peu de revenus on a monté une entreprise de micro crédit pour permettre aux retraités valides de s'en sortir. Les taux de remboursement étaient de 12 %, plus faible que dans leur tontine, il n'y avait aucune caution déposer . J'ai mis 5 millions CFA ,j'avais un partenaire en France qui a mis 25 Millions de Francs CFA car il trouvait le projet intéressant, il était prêt à doubler la mise si ça marchait. Au bout de trois ans on a fermé, taux de remboursement presque nul. Les gens qui avait pris les crédits ont tous trouvé une raison de ne pas rembourser, "l'argent venait de France" et le directeur du projet au Cameroun pris la plus grosse somme pour lui. A l'exception de trois d'entre eux, dont une femme qui a monté un pressing et qui nous remercie encore aujourd'hui. Certes l'état camerounais n'est pas viable, mais QUID de la responsabilité individuelle ? l'africain met toujours dans l'autre la cause de ses malheurs, c'est ce qu'on appelle la sorcellerie, et ça convient a tout le monde. Cordialement Ferdinand EZEMBE
Par  le 08/09/2017
Très bon constat... Par contre le "système" est si sclérosé et les nominations à des postes de responsabilité si... tribales que même un coup de balai n'y suffirait. Ne rêvons pas d'un ouragan de style...Irma.


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